Dans le département de l’Yonne, les bancs de craie sont très présents et ont été naturellement employés pour l’architecture locale. Le paysage, si on fouine un peu, a conservé les stigmates de l’activité des carriers.
Inutile de s’étendre en phrases interminables dignes d’un cuistre dont la logorrhée verbale provoquerait un inéluctable sauve-qui-peut bien compréhensible de la part du lecteur altruiste venu consacrer un peu de son temps à la lecture de cet article, bref, lecteur avide de savoir, vous trouverez une description très complète de cette activité icaunaise disparue ici et là.. Merci ASEPA qui propose des articles fort intéressants.
Bien dissimulée dans la forêt, nous allons visiter une petite carrière souterraine qui n’a pas été vandalisée. La chose est suffisamment rare pour être mentionnée. Sensibles à l’aspect esthétique et insolite, nous essayons également de comprendre l’évolution de ce lieu singulier.
Le plafond percé d’un puits nous fait supposer que l’extraction a commencé par le fonçage de celui-ci afin d’une part atteindre la strate exploitable, d’autre part pour ménager l’exploitation agricole du terrain en surface. Cet accès vertical est appelé « essort » dans la région rémoise.
Merci à exxplore pour le prêt de la photo.
Au fur et à mesure de l’avancement de l’extraction, la configuration de la carrière a évolué, excavant un volume de plus en plus grand. En plusieurs endroits, les vides engendrés ont fini par déboucher au jour. Nous voyons ici une « fenêtre » obturée plus tard par une palissade afin de contenir les déchets de taille déversés à l’extérieur.
Les secteurs abandonnés en cours de taille nous indiquent bien les différentes phases d’extraction des pierres taillées.
Le front de taille est arasé. Au pic ou à l’herminette ? Les traces laissées ici montrent l’emploi de deux outils différents pour arriver au résultat souhaité.
A l’aide d’une lance ou aiguille, deux saignées horizontales et parallèles sont pratiquées dans la masse et délimitent le format des futurs parpaings..
L’étape suivante consiste à creuser les saignées verticales..
Dans ces entailles seront insérés en force des coins de bois. Sous la pression, le moellon se détache de la masse. On distingue bien l’aspect irrégulier du nouveau front de taille contrastant avec les zones taillées.
Les blocs extraits seront stockés à l’abri afin d’éliminer leur teneur en eau (20%).
Les plans de taille ne sont pas orthogonaux. L’angle d’attaque est d’une dizaine de degrés sans doute afin de ménager la place nécessaire à la manutention des outils.
Concurrencée par le ciment, cette activité pénible a cessé petit à petit. Comme bien souvent, ces cavités anthropiques ont été réutilisées comme champignonnières à partir de la fin du19 e. On peut distinguer sur la gauche des traces de meules .
Plus récemment hélas, elles peuvent servir de dépotoirs. Consolons-nous en pensant que, dans deux ou trois mille ans, cela fera le bonheur d’archéologues s’interrogeant sur les dieux à qui ces offrandes étaient destinées …
Fermons cette parenthèse peu ragoutante et profitons de notre belle petite carrière épargnée. Voici quelques photos qui donnent une idée des espaces dégagés par l’extraction de la craie. Ces successions d’escaliers et d’étages suspendus évoquent un univers sorti de l’imagination de Escher.
Attention, on peut croiser dans ces souterrains d’étranges chauves-souris !