Vestiges miniers à Carmaux

 

Un soleil de plomb domine ce paysage tarnais. Il règne un grand calme, la chaleur semble même étouffer les sons, mais ce ne fut pas toujours le cas .

carmaux (12)Cette impressionnante cuvette n’a rien de naturel ! Plus d’un kilomètre de diamètre pour une profondeur de 300 mètres, c’est le résultat de ce qui est encore à ce jour, la plus importante excavation houillère d’Europe.

En 1752, l’exploitation industrielle et souterraine du charbon commence sous l’impulsion du marquis de Solages.
Fin XIXe, la mine emploie plus de 2000 personnes. Des grèves sévères ont lieu. Jean Jaurès est élu député de Carmaux en 1895. La ville devient un symbole du socialisme.
En 1945, les mines sont nationalisées.
A partir des années 1950, la concurrence du pétrole entame une période de déclin irréversible.
En 1980 F. Mitterrand s’engage à soutenir l’activité minière sur le site.
Suite à des mouvements de grève, une tentative d’exploitation à ciel ouvert est lancée pour tenter de sauver la filière. L’aventure de durera qu’une dizaine d’année.
1985 : début de l’exploitation à découvert.
1987 : fermeture du dernier puits.
1997 Fin de l’exploitation du charbon.
La réhabilitation du site se fait non sans mal en transformant celui-ci en un parc familial de loisirs et d’aventure.
Voici un petit aperçu de l’évolution du site.

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Place aux images.
Moi qui suis toujours à la recherche des témoignages de l’ activité des fouisseurs de terrain et qui m’ ébaubis à la vue d’un reste de berline perdue dans la forêt de Fontainebleau, moi qui trouve que la rouille n’est pas dénuée de poésie et pas que grâce  aux possibilités de rimes qu’elle offre, ici, je suis comblé !
Sur les gradins qui flanquent le cratère sont exposés quelques monstres responsables de l’excavation. La taille de ces petites usines ambulantes est on ne peut plus spectaculaire !
Une pelle LIEBHER qui accuse 160 tonnes sur la bascule.carmaux (10)
Ce dumper possède des roues d’un diamètre de deux mètres.carmaux (9)carmaux (11)

 

Cette excavatrice aux chenilles surdimensionnées semble sortie d’un décor de Stars war !
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Elle alimentait un tapis roulant amovible.

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Le paysage ne pouvait pas lutter face à de tels engins et on comprend rapidement qu’une dizaine d’années suffirent à modifier complètement sa physionomie.

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Ces grosses bébêtes sont conçues pour faire des trous, mais en 1985, leurs puissances fut employées à un autre usage :


 

Nous allons voir maintenant que si la force industrielle de ses engins est colossale, la puissance destructive de la bêtise humaine n’a rien à lui envier.
Une fois extrait, le charbon doit être débarrassé de ses impuretés. Au Tronquié, une usine de lavage est installée. Depuis sa fermeture aux alentours de fin 1990 elle est la proie de visiteurs malveillants dont l’acharnement laisse pantois.
carmaux (20)Tout est tagué, cassé, brulé, au grand découragement du propriétaire actuel. Certes, le photographe y trouvera toujours un intérêt puisque cet imposant édifice à la structure ajourée réserve malgré tout des possibilités photogéniques mais quel gâchis !
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Une double rampe d’accès  amenait le charbon aux lavoirs.

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Voici ce qui reste des sanitaires ! Quelle constance dans la destruction.

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Ainsi finit le patrimoine industriel…
Ce site, pollué et dangereux, est à éviter. Heureusement, on peut se consoler à Cagnac les mines. Le musée de la mine, que l’on doit à l’initiative d’anciens mineurs soucieux de conserver un témoignage de ce qui fut la richesse de Carmaux, nous replonge dans les conditions de travail de l’époque.
Par exemple, on peut voir à gauche des piliers hydrauliques, au milieu le convoyeur blindé et à droite la haveuse à tambour.

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Mine de …laiton ?

 

Je viens d’effectuer une mise à jour de l’article sur les soutènements miniers et je vous invite à le consulter en cliquant.hand-cursor

 

Je ressorts également de mes cartons des photos d’une mine dont l’entrée a disparu comme trop souvent sous les attaques de bulldozers sécuritaires. Pourtant, bien stabilisée, elle n’offrait pas de dangers particuliers en tout cas bien moins qu’une randonnée en Vélib ! Elle offrait un spectacle insolitede toute beauté. Tant pis …Il ne restera bientôt plus aucune trace de cette activité.
Pénétrons dans les entrailles de la terre et jetons un dernier coup d’œil à la flore stomacale de ces boyaux creusés par la main de l’homme.
Vous avouerez que Baguenaudes n’a pas peur de se mouiller pour aller à la pêche aux endroits pittoresques.

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Attendu que le froid me fait un peu claquer des dents, je ne vais pas m’étendre en commentaires superflus, les photos parlent d’elles-mêmes La manière dont la nature panse ses plaies récompense largement les quelques efforts nécessaires à l’exploration de cet univers insolite et perdu.
Bonne visite nostalgique en cliquant sur l’image suivante.

Diapora

 

Mineurs, maîtres du barreau

 

Spécialistes de Droit Pénal, veuillez bien m’innocenter pour ce titre équivoque puisque c’est le barreau d’échelle qui est le prétexte de cet article.
Le sujet peut vous paraître bien mince, mais vous allez voir qu’on peut développer.

Bien que depuis fort longtemps en Europe la remontée du minerai ne s’effectue plus à dos d’homme, au cours des pérégrinations minières, parmi les vestiges de l’activité que l’on rencontre le plus souvent, se trouvent les échelles métalliques ou ce qu’ il en reste. (Celles en bois ont, pour la plupart, fini rongées par les mérules.)

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Comme les trémies à qui elles sont souvent associées pour leur maintenance, elles sont porteuses d’espoir de zones à découvrir pour l’explorateur. Qu’y a-t-il au bout du dernier échelon ? D’interminables galeries encombrées de berlines ou seulement, comme bien souvent, une petite chambre d’exploitation ?

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Ces échelons sont bien tentants, mais hélas, suivant le milieu, ils ont bien du mal à résister aux attaques conjuguées de l’humidité et du temps. Ce barreau par exemple est âgé d’une cinquantaine d’années et son état n’incite pas vraiment à faire confiance aux échelles du secteur.

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On peut bien sûr utiliser cette technique pour tenter d’atteindre l’éventuel nirvana qui se cache en haut de ce bure.

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Mais il est plus rationnel et prudent d’employer les méthodes de progression sur corde.

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Ces échelles, longues en moyenne de 2,50 à 3 mètres, sont parfois mises bout à bout de façon audacieuse. J’en ai vu reliées uniquement par du fil de fer. Cela n’arrêtait pas les mineurs qui empruntaient des sections parfois d’une grande hauteur.

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On imagine facilement le danger et la fatigue que procurait l’exercice.
Si à la moitié du 19e on était bien conscient de cet état de fait, ce n’est pas pour cela que les enfants en étaient dispensés.
Document de 1864 à lire

 

Quand la hauteur des puits rendait l’emploi des échelles impossible, le personnel était véhiculé dans des cuffats, sorte de tonneau suspendu à un câble ou une corde.

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Cuffat(1)

http://crassier.double.monsite-orange.fr/

 

La possibilité de rupture du câble et les chutes de pierres rendaient ce moyen très périlleux. Du fait du tressage de la corde ou du câble, il était impossible d’éviter le mouvement de rotation du cuffat, car celui-ci n’était pas guidé dans le puits. L’entretien de ce moyen de transport était onéreux et d’un faible rendement à cause de sa lenteur. De plus, le transport du personnel impliquait une interruption de la remontée du minerai.

 

L’échelle mobile.
Pour obvier à ces inconvénients, un ingénieux système d’échelle dite oscillante a été créé. L’échelle, reliée à une machinerie, effectue un mouvement vertical de va-et-vient. Le mineur passe alternativement de l’échelle à des paliers fixes disposés au long de la cheminée.
Ce système permet ainsi de monter ou descendre sans effort.
Plutôt qu’une longue explication laborieuse, voici une illustration du principe:echelle-mobile

 

Inventée par H. Sarton en 1776, cette méthode n’a d’abord pas attiré l’attention, mais refit son apparition dans les années 1840 en Allemagne (Fahrkunst) et Cornouailles (man-engine).Dans le système mis en place dans la mine de Hartz, ce sont deux tiges munies de paliers qui oscillent verticalement. Le mineur passe de l’une à l’autre. Par sécurité, une échelle fixe est située entre les deux tiges mobiles.
Plan

 

En 1845 M. Warocqué en Belgique perfectionne le principe et met le système en application à la mine Mariemont. Des verticalités de plusieurs centaines de mètres ont pu être équipées.

Description avec plans.

 

L’amélioration de l’aménagement des puits avec notamment l’usage de cages guidées sonna l’abandon progressif de ces échelles mobiles.
Une démonstration au Bergwerksmuseum Grube Samson :

Jules Verne, dans son roman peu connu les Indes noires, mentionne le système des échelles oscillantes. (Page 72).
Si l’exploitation des vieilles mines vous intéresse, je vous invite à parcourir ce livre où il a puisé son inspiration. Vous pourrez y lire la description des échelles oscillantes à partir de la page 245. De plus, les illustrations de Jules Ferat sont d’un romantisme magnifique.

Vous pouvez également consulter  les conditions de travail des mineurs à la moitié du XIXe.

Et tout ça à partir d’un barreau d’échelle rouillé !

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Trémies en mine

 

Dans les mines, suivant la configuration du gisement et les méthodes d’extraction qui en découlent, le minerai est fréquemment déversé dans des goulottes plus ou moins verticales afin de parvenir dans une galerie de roulage où il sera acheminé soit vers un cavage, soit vers un puits. Le terme « trémie » désigne ces goulottes qui fonctionnent par gravité, mais aussi par extension, le système qui au débouché dans la galerie de roulage permet de réguler et guider la chute du minerai dans les berlines . Pour l’explorateur, ces systèmes représentent toujours une rencontre excitante tant par leurs cotés esthétiques que comme indication de la présence d’un réseau à un autre niveau. Passons en revue quelques trémies croisées ça et là.

 

Au milieu d’un rideau de fistuleuses, une structure en bois se profile.
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Cette embouchure est des plus basiques, servant juste à guider la descente du minerai au dessus de la berline.
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Voici une autre galerie desservie par le même type de toboggan.
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Ici, les trémies sont munies d’une trappe métallique articulée.
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Une époque plus récente associée à un débit plus important, font que les systèmes se complexifient.
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Les méthodes d’obturations sont très variés et il n’est pas rare de rencontrer des trémies différentes au sein de la même galerie pour notre plus grand plaisir.
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Ici, l’air comprimé remplace la force humaine pour manœuvrer l’ouverture de la trappe.
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Maintenant, c’est l’électricité qui prend le relais pour actionner ces margoulettes d’acier dont la taille devient impressionnante.
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trémie (18)Pour compléter ces appareils dentaires, de lourdes chaînes font barrage aux postillons !

 

De plus en plus gros !
Il existe des trémies qui font également office de concasseur mais, je ne pense pas que ce soit le cas ici malgré la taille impressionnante de l’engin.
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Faisons maintenant un tour rapide vers le haut de ces goulottes.
Nos premières petites trémies en bois étaient alimentées par des tubes de tôle d’un diamètre d’un mètre environ .
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Tandis que la dernière bée sur un large entonnoir protégé par une grille faite de rails.
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Extrait de British Pathé

 

Pour l’explorateur prudent et expérimenté il est parfois possible d’emprunter ces goulottes pour atteindre d’autres niveaux .
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Nous terminons en nous attardant sur ces mandibules dont les dents se sont couvertes d’un tartre des plus spectaculaires.
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De quoi rester bouche bée !
A bientôt pour d’autres observations.

 

Colonie agricole et pénitentiaire du Luc (Genèse)

Colonie agricole et pénitentiaire du Luc (Genèse)

Baguenaudes qui a pour habitude de folâtrer à quatre pattes dans l’herbe ou la boue et dont la plume et l’humour possèdent la légèreté d’un AMX 30 rouillé, Baguenaudes, donc, s’attaque aujourd’hui à un sujet bien pesant que l’Histoire, penaude, se dépêche d’oublier.

Cliquez sur les textes colorés en bleu pour avoir plus de détails.

L’objet de ces propos liminaires concerne une colonie agricole et pénitentiaire fondée en 1856.

Plantons le décor:

Nous sommes sur les Grands Causses où la nature a façonné des paysages empreints de majesté. Soleil de plomb l’été et grandes froidures l’hiver, il a fallu aux paysans la ténacité d’une tique pour s’accrocher et subsister sur ces terres caillouteuses et dépourvues d’eau excepté quelques lavognes souvent taries au plus fort des chaleurs.

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Quand on arpente ces paysages somptueux, il est difficile d’imaginer les événements qui s’y déroulèrent il n’y a pas si longtemps. Pourtant, bien cachés, des vestiges impressionnants demeurent et racontent une histoire qui ne peut laisser indifférent.

 

De ces grands espaces contemplatifs émane  une impression de liberté, pourtant, paradoxalement, c’est une des raisons de l’implantation d’une colonie pénitentiaire en 1856. Ici, pas besoin de grandes murailles ni de grilles, l’étendue du paysage désertique rend toute tentative d’évasion vouée à l’échec. Pourtant, plus d’un colon ont été tentés par une envie irrésistible de liberté, rêve qui  se transformait immanquablement en cauchemar au cours d’un séjour en cellule d’isolement.

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Origine des colonies agricoles et pénitentiaires :

Tout ceci prend une dimension encore plus poignante quand on sait que les détenus étaient mineurs et orphelins pour une bonne part. La misère latente qui régnait au XIXe parmi les classes laborieuses favorisait une nombreuse délinquance juvénile qui effrayait le bourgeois.

En attendant l’invention du Karcher, les gavroches et sauvageons livrés à eux-mêmes, se retrouvaient facilement derrière les barreaux.

La fin du XIXe voit émerger une prise de conscience concernant le manque d’efficacité de la rétention carcérale pour les mineurs où la cohabitation avec les adultes fait des ravages.Inspirée du système pénitentiaire de la prison d’Auburn dans l’État de New York, une première tentative pour pallier la promiscuité des prisons et tenter de remettre ces mineurs dans le droit chemin eut lieu à la Petite RoquetteLa délinquance étant considérée comme « maladie contagieuse », les enfants étaient internés en complet isolement cellulaire interdisant toute communication entre eux. Travail, école, déplacements, office religieux se font sans aucun contact visuel ou oral. Les déplacements s’effectuent cagoulés!  Folies et suicides décimèrent rapidement les détenus. Nous voyons ici les stalles individuelles empêchant tout contact avec son voisin pendant la messe.

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Constatant l’échec de cette méthode « rédemptrice », il est proposé d’envoyer les délinquants à la campagne dans des colonies publiques ou privées où sabre, goupillon et travail seront les nobles leviers chargés de remettre les mineurs dans la bonne direction. Associée à une formation aux métiers agricoles, une éducation scolaire doit être donnée.

Les filles délinquantes, quelle que soit leur religion, sont dirigées dans des établissements gérés par des congrégations du type Bon Pasteur. Elles y demeurent recluses jusqu’à 21 ans.

La loi votée en 1850 encourage les initiatives privées en échange d’une pension versée pour chaque enfant accueilli.

Ce but louable a rapidement été dénaturé au profit  de l’enrichissement des administrateurs ou par manque de moyens quand l’Etat diminuait les subventions. Dans un cas comme dans l’autre, les conséquences pour les enfants détenus  étaient effroyables à nos yeux contemporains. Bénéficier d’une main d’oeuvre pratiquement gratuite et corvéable à merci était une aubaine pour l’administrateur.

Il faut néanmoins garder en tête que le travail des enfants était monnaie courante. Par exemple, à Carmaux, en 1850, 20% des mineurs sont des enfants et dans le monde rural, la location des enfants était chose banale.

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Photo Wikipédia.

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Au sein des colonies pénitentiaires, il faut ajouter à la dureté du labeur, la privation de liberté, les carences alimentaires, les conditions d’hygiène affligeantes et on imagine les sévices subis par les gamins livrés à l’autorité de certains matons. Les châtiments corporels sont interdits, mais de nombreux témoignages mentionnent  des enfants roués de coups en cas de non-respect du règlement. Les surveillants n’ont aucune formation et sont souvent recrutés parmi d’anciens militaires voir d’anciens bagnards! Les colons n’étaient pas tendres entre eux non plus. Violence et homosexualité règnent dans cet univers clos ou l’absence d’affection se fait cruellement ressentir!

Par exemple, à  Aniane, pour éviter toute « perversité », les colons dorment dans des « cages à poules ».

L’éducation scolaire se borne au minimum et n’est effectuée que pendant les rares moments où les travaux laissent un peu de temps libre.

Certains colons étaient placés dans des exploitations extérieures assurant un revenu supplémentaire à la colonie.

Les colons

Un simple délit de vagabondage, un menu larcin, ou une demande paternelle suffisaient pour se retrouver dans ces colonies.

De par la loi de 1850, sont concernés : les mineurs acquittés ayant agi sans discernement, non remis à leur famille ainsi que les mineurs condamnés comme discernants à un emprisonnement  allant de 6 mois à 2 ans. Les articles 10 et 16 de la même loi prévoient des colonies correctionnelles  pour les mineurs condamnés à plus de 2 ans, ainsi que des colonies pénitentiaires pour les insubordonnés.

 

Cette loi 1850 possède un coté pervers. A la suite de son arrestation, l’enfant jugé coupable était envoyé dans des centres de correction pour une durée plus ou moins longue. Par contre, si l’enfant était acquitté pour avoir agi sans discernement, il était envoyé dans une colonie agricole jusqu’à sa majorité afin qu’il soit soustrait à un environnement susceptible de le corrompre. Pour un vol bénin ou vagabondage ou par simple volonté parentale, un gavroche de huit ans pouvait se retrouvé « colonisé » jusqu’à 21 ans.

La longueur des détentions en rapport aux délits s’expliquent par le fait que ces internements étaient appliqués dans l’idée de soustraire l’enfant  à la mauvaise influence de son environnement habituel. Ce n’était pas pour déplaire aux propriétaires des colonies privées qui bénéficiaient ainsi d’un « retour sur investissement ».

Ces conditions effroyables ont fait que les tentatives d’évasions et révoltes étaient nombreuses malgré les représailles encourues. Mitard et régime sec furent la cause de plusieurs décès. La mortalité était plus ou moins importante suivant les colonies. A Mettay, entre 1837 et 1939 environ 700 décès sont retenus. Il faut tenir compte du fait que les enfants confiés aux colonies n’étaient pas tous en bonne santé.

Sur l’hexagone, environ une soixantaine de colonies privées furent créées et une dizaine publiques. (Belle-Ile, Aniane etc.).

Le sort des filles entre les mains des institutions catholiques n’était pas plus enviable.

L’ordonnance du 2 février 1945 remplace les colonies agricoles pénitentiaires par des structures véritablement éducatives gérées par une nouvelle direction du ministère de la Justice, l’Éducation surveillée. En 1970, le mitard était encore de mise dans certains centres.

 

Avec l’actualité où la délinquance juvénile et les réformes pénales font beaucoup parler, cette évocation d’un passé pas si lointain prend une résonnance toute  particulière. 

 

L’établissement du Luc créé en 1856.

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Cette colonie, dont nous allons visiter les vestiges, véhicule quelques fantasmes au pathos exagéré. Les faits qui s’y déroulèrent sont suffisamment pesants sans qu’il soit besoin d’en rajouter.

Monsieur M . de Luc, conseiller régional du Gard, possédait une grande propriété sur le Causse. Membre du jury de surveillance de la ferme école de Mas le Conte et magistrat, il est au courant  des travaux de Demetz à Mettray dont la devise était: Sauver le colon par la terre et sauver la terre par le colon. 

Dans un but « philanthropique », il décide de faire fructifier ce domaine de terres rocailleuses en créant une colonie qui éduquerait les enfants pervertis.

S’il ne fait aucun doute concernant la volonté philanthropique de Mr.de Luc, il semblerait que la gestion ait fait preuve d’une certaine naïveté. Le recrutement des surveillants s’effectuait parmi les agriculteurs locaux. Leur manque de qualification et la perversité de quelques uns engendrèrent  beaucoup de désordres principalement entre 1865 et 1870 qui menacèrent la sérénité de l’établissement.

M.de Luc, malade, passera la main à son fils Hippolyte en 1871.

Pour rendre les terres exploitables, il a fallu épierrer de grandes surfaces, les débroussailler. Toutes les pâtures environnantes sont encore ceintes de murets impressionnants, vestiges du travail de ces pauvres petites mains chargées d’épierrer  une propriété couvrant 1500 hectares.(Deux fois plus qu’à Mettray.)

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D’après l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours, la nourriture était très correcte au Luc, voire bien supérieure à celle des paysans locaux. Pain et fromages ne manquaient pas, la colonie possédant son propre moulin. L’étendue de cette prairie qu’occupait le potager donne une idée de l’importance de ce dernier. Suivant les époques, il fallait nourrir plus de 300 bouches.

Le bosquet à droite recouvre les latrines dont la fosse est pourvue d’une ouverture qui bée vers le potager. Toutes les fumures, mélangées à la paille, sont bonnes à utiliser.

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Nous avons vu que les vertus pédagogiques du travail de la terre étaient prônées. La tâche principale des petits était l’épierrement du sol, le ramassage et hachage du buis pour les litières. Les plus grands participent aux travaux de culture, horticulture et élevage. Le Luc possédait un des plus grands troupeaux de la région (jusqu’à 900 brebis). Grace au travail des colons, la colonie peut pratiquement vivre en autarcie.

Des voies de communication sont également tracées. Les promeneurs qui arpentent le GR71 entre le Luc et La Couvertoirade ne se doutent pas que ce chemin nivelé est le  fruit du travail fourni par les enfants du Luc.

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Il est maintenant difficile de se faire une opinion concernant les conditions de vie des enfants du Luc. On note un grand écart entre les dires de la femme du petit-fils du fondateur de la colonie du Luc (1) et les narrations concernant d’autres établissements. (2).

L’importance de la ferme, jointe au rapport d’une fromagerie, implique que le Luc n’a pas dû trop souffrir du manque de moyens financiers inhérent aux autres établissements. Par ricochet, l’existence des colons, bien que très dure, devait être meilleure que dans la plupart des autres colonies. Malgré les rigueurs de l’hiver, le taux de mortalité au Luc  était semblable à celui des autres colonies et parait-il, inférieur à celui subi par les autochtones. Pas facile à vérifier.

L’entrée du cimetière est enfouie sous une végétation qui ne tardera pas à venir à bout du porche si rien n’est fait.

D’après les statistiques pénitentiaires, j’ai relevé pour la période de 1856 à 1904  au moins 135 décès. Les causes sont principalement la tuberculose et les fièvres typhoïdes fléaux de cette époque. Combien de colons reposent  sous cette  parcelle oubliée ? Je ne sais pas. Tempus fugit, memoria manet dit-on, mais ce n’est pas vrai  pour les enfants du Luc. L’endroit est devenu une friche anonyme quasi impénétrable.

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A l’intérieur, la croix qui vraisemblablement surmontait ce piedestale a été enlevée du lieu de repos éternel. Un siècle plus tard, tout semble fait pour que disparaissent de la mémoire collective les souvenirs de cette période qui a vu la population profiter directement ou indirectement de la présence des colons. Pour ces colons, c’est la double peine. Après avoir vu leur jeunesse privée de liberté, ils sont mis au ban de la mémoire collective…

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Pardonnez ce texte inhabituellement long sur Baguenaudes, mais le souvenir de ces enfants mérite de sortir de l’oubli en dépit du sentiment de culpabilité qui règne encore sur cet endroit.

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COGITE PARVULOS REDIRE AD ME
On trouve cette inscription sur un autre calvaire qui lui, a conservé sa croix. Effectivement, je pense qu’ils en sont revenus!

Vous n’avez pas tout vu! Dans un prochain article, nous ferons le tour des bâtiments de cette ancienne colonie.

 

Liens et documentations pour approfondir:

Audio:

(1)Reportage France Culture:Ce reportage audio résume parfaitement les impressions actuelles qui émanent de ce lieu.

France Inter. Sur les colonies :

Colonie de Mettray. (Là bas si j’y suis) . Témoignage exceptionnel d’un ancien colon.

Articles:

Genèse  des colonies pénitentiaires :

Eric Pierre. Les colonies pénitentiaires pour jeunes détenus : des établissements irréformables (1850-1914)

Jean François Condette. Entre enfermement et culture des champs, les vertus éducatives supposées du travail de la terre et de l’atelier.

Quelques dates importantes. Enfants en justice.

Livres :

La colonie pénitentiaire et agricole du Luc. Geoffroy LACOTTE. Arts et traditions Rurales 2012. (Incontournable !)

Le jardin. Jean Castan 1992 éd La Mirandole. (L’auteur est le petit fils d’un des gardiens chef du Luc.)

Les Enfants du bagne, Marie Rouanet,(2) éd. Documents Payot, 1992

Enfants du malheur ! Les bagnes d’enfants. Henri Danjou, éd la manufacture de livres.

 

Visite et curiosités minières. Tome 4

L’approche de cette visite souterraine se déroule dans un paysage somptueux, mais, en bon gaulois, nous craignons que le ciel nous tombe sur la tête.

 

Qu’importe, bravons les éléments pour aller nous abriter sous terre. Après nous être mouillé la tête, ce sont les pieds (et le reste) ! Le plaisir de vous montrer quelques aspects de ces lieux inhabituels oblige parfois à faire preuve d’un peu d’abnégation.

 

Cette eau est certes un peu froide, mais, nous lui pardonnons quand elle offre la formation de jolies perles qui agrémentent le sol des galeries.

 

Une fois séchés, nous continuons notre progression par une galerie finissant sur un front de taille. La présence d’un échafaudage de madriers nous étonne. Après un grattage occipital, nous concluons que nous sommes en présence d’une sorte d’estrade destinée à la foration des trous de mine. Amm se trouve situé à la bonne hauteur.

 

L’exploration demande parfois de faire appel à des techniques de manœuvres de cordes un peu sportives.

 

Ces acrobaties arachnéennes permettent d’atteindre des lieux improbables comme cette imposante fissure pratiquement verticale.Elle n’a rien de naturel, c’est une chambre d’exploitation où tout le minerai a été défruité. Les pièces de bois coincées entre les épontes servent à les maintenir. Localement, on parle de « bon dieu ». Elles servent d’alerte concernant la tenue des parois. Si le bois gémit ou casse, c’est que la pression encaissante fait se rapprocher les parois et inversement si les « bons dieux » tombent, c’est que le vide s’élargit. Dans un cas comme dans l’autre, ça craint ! Bon, ici ça n’a pas bougé depuis une cinquantaine d’année et cette forêt aux troncs horizontaux est magnifique.

Détail peu visible mais intéressant, des encoches sur les parois destinées à recevoir un plancher. Ces séries de boulins sont espacées verticalement d’environ 1,50 mètre. Le filon de cette chambre a donc été exploité en progressant du bas vers le haut.

 

La visite continue par un plan fortement incliné pourvu de deux voies ferrées parallèles mais d’écartements différents.

 

Nous sommes en présence d’une « balance » qui permet la liaison entre deux travers-bancs situés à des niveaux différents.Le principe est simple et ingénieux puisqu’il ne fait appel qu’à la gravité. Un chariot asymétrique pour compenser la pente supporte la berline pleine. Un treuil à 2 poulies relie à l’aide de 2 câbles le « chariot-berline » à un autre chariot faisant office de contrepoids. Le couple « chariot-berline pleine » étant plus lourd que le contrepoids, l’ensemble descend. En bas, on enlève la berline pleine. A ce moment, le contrepoids, plus lourd que le chariot seul, entraîne celui-ci vers le haut.

Ne pas tenir compte des proportions.

 

Le système est réversible. Pour remonter des berlines vides il suffit de jouer sur le lest du contrepoids. Nul besoin de source d’énergie, la gravité fait tout le travail!.En haut, le treuil à double poulies est bien entendu munie d’un frein actionné à la main. Remarquez la position inversée des câbles dans les réas..

 

Le châssis du chariot porteur est de forme triangulaire pour transporter la berline horizontalement malgré la déclivité.

 

Nous voyons ici la partie haute des rails servant à guider le chariot et le contrepoids. On distingue une poulie de renvoie du câble côté contrepoids et l’attelage du chariot porteur. Notez la différence de largeur des voies ferrées due au fait que le chariot porteur véhicule la berline perpendiculairement à la descenderie.

 

Le bas du pan incliné étant quelque peu effondré aussi je n’ai pas pu observer la fosse de réception du contrepoids. Il reste néanmoins une berline qui attend patiemment qu’on veuille bien s’occuper d’elle.

 

Toujours plus loin nous tombons sur une autre balance remarquable.Ce gros tube d’environ 2 mètres de haut est un réservoir qui servait de contrepoids dans un puits vertical de 60 mètres de haut.Le principe est le même : le chariot- berline pleine est en bas, le réservoir vide en haut. On remplit d’eau (qui ne manque pas) le réservoir et le chariot berline monte. Au sommet, on remplace la berline pleine par une vide et en bas, on vide le réservoir. Zou ! le chariot  redescend pour aller quérir la berline pleine suivante.

 

Je n’ai hélas pas fait de photo de la poulie car la remontée du puits sur corde est plutôt sportive. Je remercie  donc le S.C.S.P. d’Alès pour ces vues de l’impressionant treuil.

 

Après avoir pris une bonne suée avec ces manœuvres de corde, nous partons nous rafraichir vers la sortie.

 

 

Tunnel minier

 Voici quelques vues d’un tunnel perdu dans les bois et dont l’état est plus que dégradé au point de ressembler par endroit à une ancienne galerie de mine.
La chose n’est pas surprenante car la petite voie ferrée qui l’empruntait servait à acheminer du minerai extrait un peu plus loin.
Entre les éboulements, on peut voir quelques soutènements intéressants et disparates. La partie centrale du tunnel est plus étroite et nettement bien moins aménagée. La fermeture programmée de la mine a peut être été à l’ origine de ces mesures d’économie. Depuis, la nature reprend le dessus et nous offre de belles concrétions.Parcourir ce tunnel n’est pas sans danger aussi, profitez de l’ambiance en regardant les photos tranquillement devant votre ordinateur.
Bonne visite. 

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Mine de zinc

Ce jour là, le soleil tape fort aussi, histoire de fuir la chaleur, c’est avec plaisir que nous entamons une exploration des vestiges souterrains d’une mine qui a fermé dans les années 1960.
Nous verrons plus loin que question fraicheur, nous n’avons pas été déçus.
Avant cela, proche de l’entrée, nous tombons sur un petit cul de sac consolidé par un soutènement.

 

Nous sommes en présence d’une cloche de carottage comme l’indique le tube qui dépasse dans le sol.

 

Au-dessus, le ciel est surcreusé afin de permettre le passage des carottiers et de la tarière.

 

Les échantillons seront analysés pour y détecter l’éventuelle présence de minerai.

 

Empruntant un autre chemin, la visite continue par une galerie décorée de concrétions laiteuse du plus bel effet.

 

Un peu plus bas, nous empruntons une zone un peu moins structurée. Nous sommes ici dans une ancienne chambre d’exploitation. Le boisage* incliné s’explique par le fait que le filon avait une moyenne de puissance* de 3-4 mètres et un pendage* de 30°.

 

Suivant le chemin qu’empruntait le minerai, nous continuons  à descendre pour rejoindre le travers-banc*, galerie de roulage qui collectait le minerai.
Il faut se rendre à l’évidence, la suite de la promenade sera humide.

 

Et un peu froide pour la saison !

 

Heureusement pour notre virilité, après un parcours quelque peu grelottant, le terrain s’assèche progressivement dévoilant de beaux enchaînements de galeries où les rails apparaissent.

 

Au détour d’un carrefour, nous tombons sur la recette* d’un bure* complètement noyé est équipée d’un système pour remonter et déverser le minerai au niveau du travers banc. Cela confirme la présence d’un niveau d’exploitation inférieur dorénavant inaccessible.

 

Un autre aspect du travers-banc avec un caniveau drainant l’eau vers la sortie.

 

La porte de la poudrière s’ouvre sur un réduit complèment vide.

 

Les vestiges métalliques de l’exploitation ne sont pas très nombreux. Ce cadre supportait vraisemblablement un ventilateur.

 

La visite d’une ancienne mine sans trouver de berline serait frustrante. En levant la tête, nous sommes récompensés par un wagonnet encore sur ses rails.

 

Provenant des chambres d’exploitations supérieures, des déversoirs en bois percent les parois du travers-banc.

 

Cette trémie* montre quelques signes de fatigue.

Nous aussi ! Après avoir parcouru ces galeries patogeantes et fort sympathiques, il faut se décider à remonter vers la surface pour mettre nos chaussettes à sécher.

Vous trouverez la définition des mots suivis d’une astérisque dans le glossaire

 

Curiosités en carrières

Encore une promenade souterraine dans une carrière de calcaire qui recèle  de fort belles choses appelées à disparaître.
Le matériau extrait est un calcaire blanc relativement tendre.  Les strates exploitées  font environ deux  mètres d’épaisseur et la carrière est globalement horizontale couvrant une surface impressionnante. Les traces de taille  indiquent  que les blocs  découpés faisaient environ 2 mètres cube. La plupart ont servi aux travaux Haussmanniens.
Comme bien souvent, cette exploitation fut réutilisée plus tard comme champignonnière.
La carrière a été exploitée en piliers tournés disposés de manière régulière  et ressemble rapidement à un labyrinthe

 

Outre les piles non défruitéesHooo, c'est beau !, le ciel est soutenu, dans certains secteurs, par les rebuts empilés derrière des murs de moellons provenant du débitage. Ce système de soutènement se nomme: par hagues et bourrage.

 

Dans cette partie de la carrière, devant des hagues, on voit des blocs abandonnés sur place et celui du milieu, curieusement, sert d’assise à un pilier à bras..

 

A cet endroit, le ciel a dû montrer quelques signes de faiblesse qui justifient ces chandelles. Je suppose que  ce renfort  date sûrement d’une époque postérieure à l’exploitation du calcaire car cet agencement gène la circulation dans la galerie et les étais sont encore dans un état relativement correct.

 

Nous avons ici un témoignage discret et fragile: un carrier a astucieusement employé le noir de fumée de sa lampe pour faire un tableau noir sur lequel figurent des chiffres dont nous ignorons la signification.

 

 On peut voir dans certains secteurs des contrôles de la pression que subissent les piliers . Dans une fente horizontale, est insérée une sorte de lamelle comportant un « coussinet » et un manomètre indique la pression que subit ce coussinet. Un rapide coup d’oeil nous confirme que l’on ne risque rien! Poursuivons la visite.

 

 Plus loin, une galerie de recherche a mis à jour une source qui forme un joli petit lac d’eau limpide.

 

Comme je l’ai écrit, cette carrière est assez vaste et certaines parties pourraient sembler monotones à parcourir. Il faut ici rendre hommage à Erik Rotheim le bienfaiteur qui a breveté la bombe aérosol. Les artistes locaux  peuvent ainsi décorer la blancheur des murs d’expressions artistiques d’un haut niveau. Comme l’inspiration ne leur manque pas, ils ont également brûlé quelques voitures pendant des manifestations de culture alternative ajoutant ainsi un dépôt  noirâtre  au sol de la carrière. Quand on pense que la chaleur dégagée  risque en plus de faire écrouler le plafond des galeries, on ne peut être qu’admiratif quant à l’imagination créative de ces artistes… en herbes.  Bon, au moins pendant ce temps là, ils ne  traînent pas dans les musées.
Faisons abstraction de tout cela en contemplant ces beaux renforts voûtes.

 

A cet endroit, pas de dégradations pariétales, les infiltrations d’eau ont nécessité l’emploi d’une pompe et décorent à leur manière les parois par l’apport de calcite.

 

Petit à petit, les concrétions se développent apportant une touche insolite à ces longs couloirs.

 

Après avoir erré dans ce dédale, fatigués et crottés mais heureux, nous prenons un bon bain et rentrons au volant de notre machine à remonter le temps.

 

Vous pouvez découvrir d’autres aspects  de  ces lieux insolites en cliquant sur l’image suivante:

Ardoisières d’Anglars

Dans le Nord Aveyron, la géologie est assez complexe. La tectonique, l’activité volcanique, l’érosion tout ça n’a pas fait semblant.  Pour faire simple, on va dire que basalte, grès rouge,  calcaire et schiste se côtoient joyeusement pour le plus grand plaisir des yeux. L’habitat rural, employant naturellement la matière première, se trouve donc  très diversifié suivant sa localisation.Si la forme et la complexité des bâtis varient beaucoup, il est un élément qu’on retrouve pratiquement partout: En effet, de la plus modeste grange à l’édifice bourgeois ou religieux, les toitures sont recouvertes d’épaisses ardoises  brillantes.

 

Cet aspect est dû au mica contenu dans la roche. Relativement épaisses et taillées en forme de gouttes d’eau, ces lauzes de micaschiste sont fixées sur les solives par une cheville de bois ou un clou. Le poids engendré par ce type de couverture nécessite une charpente solide.

 

par papy38

 

Les lauzes étaient souvent extraites en souterrain pour atteindre le filon non altéré par les conditions atmosphériques et obtenir ainsi une pierre de qualité. De plus, la pierre, détachée des strates sous-jacentes, conserve une humidité qui facilite grandement sa taille. Une fois ramené au jour, le schiste en séchant devient beaucoup plus compliqué à déliter..
Partons en visite sur une ancienne ardoisière au Nord du Cayrols.

L’exploitation s’est effectuée sur les 2 versants d’un petit vallon assez escarpé. L’activité s’est déroulée du 16ème siècle jusqu’en 2007, faisant vivre de nombreuses familles en offrant un complément aux revenus des exploitations agricoles.

Les déchets de taille recouvrent les pentes du vallon de façon assez spectaculaire. Il est très malaisé de progresser parmi ces piles d’assiettes qui glissent  les unes sur les autres.

 

Seuls 2% des roches extraites étaient utilisables, le reste était rejeté dans les pentes du vallon recouvrant les anciens chemins et tunnels accès.

 

Il n’est pas facile de retrouver les ouvertures qui mènent aux nombreuses chambres d’abattage sans indication. Beaucoup sont éboulées et la végétation  masque facilement les entrées. Le terrain étant communal, chacun y allait de son trou quitte à se retrouver  parfois chez le voisin.Mais après moult glissades et combats épiques contre  les ronces carnivores et affamées nous avons pu pénétrer à l’intérieur de quelques salles  d’exploitation..

 

L’ambiance est assez chaotique et humide. Le peu de lumière en provenance du cavage est rapidement absorbée par la couleur gris foncé de la roche. Pendant l’exploitation, l’éclairage se faisait à l’aide de lampe à acétylène.

 

Les galeries que nous avons parcourues ne sont pas très longues (50 mètres en moyenne)…

 

mais la hauteur des vides peut être conséquente dans certaines salles.

 

Point de soutènement, malgré la hauteur du ciel, les carriers faisaient confiance à leur connaissance du terrain et de mémoire d’hommes il n’y a pas eu d’accidents notoires. Attention, il faut quand même être très prudent quand on se promène dans ces salles, le sol est  plus que glissant et les parois peuvent devenir instables avec le temps. Avoir une tuile dans une ardoisière serait le comble!

 

En fonction de la demande, l’abattage se faisait à la poudre noire et au pic. Les blocs étaient refendus sur place. Les blocs et les déblais étaient transportés au jour  à l’aide d’un wagonnet poussé à la main sur des rails type Decauville.

Ensuite la taille des formes d’ardoises s’effectuait souvent le même jour pour profiter de leur humidité. » La pierre, c’est comme les arbres, si on l’arrache de la terre, elle sèche  » m’explique un ancien carrier rencontré sur le site.

 

Depuis les années 80  le bruit des massettes s’est tu petit à petit dans le vallon. Des messieurs en cravate se sont aperçus qu’il n’y avait jamais eu d’autorisation d’exploiter. Malgré la qualité de ses ardoises, l’exploitation de la carrière n’a pu résister à la pluie de mesures contraignantes qui se sont abattues sur le site.Un projet de réouverture des ardoisières d’Anglars ressort des dossiers de temps à autre. L’exploitation ne se ferait pas en souterrain et les blocs extraits par explosifs seraient stockés dans des bassins pour entretenir l’humidité en attendant leur taille définitive. L’impact esthétique  sur l’environnement risquerait d’être désastreux. A suivre donc…En attendant, on fait venir maintenant les lauzes du Brésil et l’ardoise est salée!!!On marche sur la tête dites vous?

 

Quitte à marcher, parcourons les pentes abruptes pour y dénicher quelques vestiges.A l’extérieur subsistent quelques ruines de cabanes où étaient taillées les lauzes à l’abri des intempéries ou du cagnard qui peut régner sur ces versants.

 

Les ardoises étaient remontées à l’aide de chars à bœufs sur des chemins très pentus qui portent encore les stigmates laissés par les roues.

 

Un article de Baguenaudes sans berline serait bien étonnant ! On peut également, en cherchant bien, dénicher quelques exemplaires bien défendus par la végétation.

 

 

L’association Histoire et Patrimoine d’Anglars du Cayrol (12500) effectue un travail remarquable afin que ne tombe pas dans l’oubli cette activité qui a occupé jusqu’à 160 personnes sur la commune. Des cabanes sont remontées, des chemins ré ouverts et un petit musée rassemble photos, outils et maquettes qui servent de support à des animations très intéressantes.

 

Attention!. La visite  non guidée de ces lieux n’est pas sans danger. En effet, le terrain n’étant plus entretenu, la nature reprend ses droits et comme elle a horreur du vide, je vous laisse deviner quelles sont ses intentions. Il est plus sage de visiter en regardant les photos suivantes:

 

A bientôt pour de nouvelles observations et n’oubliez pas vos sabots.