Qu’a t’on à gagner en haut de ce poteau aux allures de mats de cocagne ? Du vent… mais un vent qui fut précieux.
Alors que le développement de l’agriculture demande toujours davantage d’irrigation, ces mécanismes sont hélas d’un faible rendement. On ne peut agrandir indéfiniment la taille de ces turbines sans qu’elles deviennent vulnérables aux coups de vent.
C’est là qu’interviennent Ernest-Sylvain et Auguste Bollée (1814-1891). Issus d’une famille d’inventeurs, ils créent un type de turbine qui n’est pas dénué d’élégance et qui s’oriente tout seul pour un rendement optimum. Ce dernier est amélioré par une combinaison d’un stator et d’un rotor. De plus, un ingénieux dispositif met la turbine en sécurité quand Eole fait des siennes.
En 1885, Bollée baptise son système : Eolienne qui devient par le fait le nom commun validé par Larousse en 1907.
Quatre modèles sont crées :
Source wikipédia.
Certaines sont érigées au sommet d’ un pylône, d’autres, au faîte d’un joli mât haubanné.
…. ..
Gros plan sur un stator de modèle 3 :
Les 44 déflecteurs fixes sont chargées de diriger le vent vers les pales du rotor.
Sur l’autre face, nous avons le rotor avec ses 32 pales rotatives.
Un engrenage conique transmet le mouvement rotatif à l’arbre vertical.
Le principe repose sur la rotation d’une petite hélice (moulinet gouverneur) située en amont du stator. Sa position est basse afin que la turbine ne masque pas la prise au vent.
Conditions initiales :
1) Le moulinet gouverneur est installé sur une structure pouvant pivoter de 90° autour d ’un axe vertical au bout d’une charpente solidaire de l’ensemble moteur stator-rotor. Il est maintenu dans une position perpendiculaire au stator-rotor par un contrepoids (ou un ressort calibré dans les premiers modèles). (Nous verrons plus loin comment).
A – VENT INFERIEUR A 6 OU 7 M/S :
1) le vent est face au rotor : il le fait tourner, le rotor actionne les pompes, le moulinet est en drapeau, les pales restent immobiles;
2) Si taquin, le vent change de direction: Le moulinet n’est plus en drapeau et ses pales se mettent à tourner. Le système d’engrenage fait pivoter le stator-rotor sur son axe vertical. Quand le moulinet se trouve parallèle au vent (en drapeau), la rotation de l’ensemble s’arrête. Le stator-rotor (maintenu perpendiculairement au moulinet ) se retrouve face au vent de manière optimum et le rotor tourne.
La force exercée par le vent devient supérieure à celle exercée par le contrepoids. Le moulinet n’est plus maintenu dans une position orthogonale par rapport au stator-rotor.
1) La force du vent bascule toute la structure portant le moulinet. Celui-ci, qui était en drapeau par rapport au vent, a tendance sous l’action du vent à pivoter et présenter ses pales au vent.
Les pales se mettent à tourner et le moulinet fait pivoter le stator-rotor. Toujours repoussé par le vent, le moulinet continue de pivoter sur son axe jusqu’à se retrouver en drapeau dans une position parallèle au stator-rotor. Moulinet et stator-rotor se retrouvent en drapeau et cessent de tourner. La structure porteuse du moulinet, ayant atteint la position maximale de bascule (90°), y est définitivement maintenue par un loquet et ne peut donc revenir à sa position normale, les pales du gouverneur restent en drapeau.
Notons que Bollée a pensé à tout :
Tant que la structure du moulinet n’a pas atteint sa position maximale, si le vent faiblit, le contrepoids redevient opérant, replaçant la structure du moulinet perpendiculaire au stator-rotor. On se retrouve dans le cas de figure A
Si le vent fripon change de direction.
L’ensemble stator-rotor est décalé angulairement par rapport au vent : les pales du moulinet tournent de plus en plus vite et amènent le stator-rotor retors en position perpendiculaire au vent. Cette position d’emballement ne dure pas car aussitôt sa structure est repoussée par la force du vent et on se retrouve dans le cas B-1.
Les animations sont très fortement inspirées de ce document :
1/ Quand le vent est normal, le contrepoids bleu, en tirant sur le câble bleu, maintient la structure rose de façon que le moulinet soit perpendiculaire au stator-rotor.
Quand le vent augmente au delà d’une certaine limite, la force exercée par Eole sur le moulinet est plus grande que celle exercée par le contrepoids bleu. La structure rose pivote vers la droite.
A ce moment, deux cas de figure:
a/ Si le vent faiblit, le contrepoids bleu ramène la structure rose en place. (1/).
b/ Le vent forcit. La structure rose continue de pivoter jusqu’à se retrouver en butée sur le bâti fixe. Un arrêtoir monté sur un ressort bloque la structure dans cette position de sécurité. Pour rendre le système opérationnel, il faut alors tirer sur la chaine ( flèche mauve ) ce qui a pour effet d’effacer l’arrêtoir. Ainsi le contrepoids bleu peut ramener la structure en position opérationnelle.
Voici une photo du dispositif aimablement fournie par l’ASEPA:
Autour de ce mat un élégant escalier s’enroule pour desservir une petite plate forme protégée par une rambarde au profil gracieux.
On apprécira l’esthétique art déco des lettres matérialisant les points cardinaux ainsi que la découpe de la girouette.
Veuillez bien pardonner la qualité des photos suivantes prises au travers d’un plexiglas plus franchement transparent.
Au pied de l’éolienne, l’arbre vertical, à l’aide d’engrenages coniques, met en mouvement le vilebrequin des pompes. Un grand volant d’inertie est chargé de réguler le mouvement
La présence de la poulie en bois à droite me fait supposer qu’ un moteur (gaz, pétrole ?) devait prendre le relais en cas de pénurie de vent.
Les deux éoliennes qui ont servi de support à cet article se trouvent à Courville-sur-Eure et Berchères-les-Pierres en Eure et Loire.
La liste complète:
Un article complet (qui omet quand même la description du système d’orientation)
Ci-dessous, plaque apposée sur le prototype élevé dans la propriété Bollée en 1872.
Merci pour les explications de ce système génial d’orientation et de mise en sécurité du rotor
Pas facile à comprendre vu qu’on se perd dans les couleurs où le vert est rose, le bleu est vert, le rose est rouge ! mais par ces temps de froidure, ça fait chauffer les neurones
Dans notre région, 2 éoliennes Bollée sont classées MF: Vaudeurs et La Postolle. Une machine est actuellement déplacée pour restauration et installation à Sens et venant de Villevalier. Elle sera installée au Parc du Moulin à Tan de Sens
JP de ASEPA89
Oups, c’est rectifié pour les couleurs, merci beaucoup
Si vous avez des photos du système d’orientation, je suis preneur.:)
bravo et merci!
Bonjour
Les fermiers de Loué restaurent une Eolienne type no 1 en provenance du Chateau de belle fille à Chemiré le Gaudin
Elle sera remontée au siège des Fermiers de Loué à COULANS sur Gée prochainement.
Nous avons refait toute la tôlerie à neuf de la roue après numérisation de l’ancienne pour pouvoir la refabriquer à l’identique .
Les pignons usés on été refait aussi en bronze et acier pour la roue.
Il nous manque la petite roue qui reste à faire et nous sommes à la recherche du poids du contrepoids qu’il faut pour que le système d’orientation puisse se mettre en drapeau.
Merci d’avance pour votre aide
Cordialement
Thierry Bergue
Bonjour
Félicitations pour toutes ces explications ! Dans notre village, Péault (en Vendée), il y a eu une éolienne Bollée n°3 au-dessus d’un château d’eau, inaugurée en 1930. Malheureusement, il ne reste plus rien de tout celà, exceptée une ancienne carte postale :
http://www.archinoe.net/cg85/visu_affiche.php?PHPSID=19510bfa236d796898e6da2b72838d30¶m=visu&page=0
Cordialement !
Bravo pour ce magnifique article :
Ci-après un article de l’YONNE REPUBLICAINE du 05/12/2017
Promise à la démolition, une éolienne Bollée de 1893 a été rapatriée de Villevallier à Sens en 2006. Onze ans plus tard, elle surplombe désormais le parc du Moulin à Tan.
Une opération d’envergure pendant plus de quatre heures. Hier matin, une immense roue est venue se poser au sommet d’une éolienne Bollée de 1893, reconstruite au parc du Moulin à Tan. Le point final d’une opération de sauvetage patrimonial débutée en 2006.
La Ville de Sens s’est fait offrir cette construction en juillet 2006, sous l’impulsion de Jean-Luc Boulard, responsable du service espaces verts de l’époque. Après délibération du conseil municipal, les pièces démontées sont rapatriées au parc du Moulin à Tan le 21 juillet. Débute alors un long travail de réhabilitation. Le Lions club de Sens s’associe au projet pour soutenir la municipalité. Près de 35.000 €, sans comptabiliser les heures de travail en régie des agents de la Ville, seront nécessaires à la remise en état.
Dès 9 heures hier matin, les agents municipaux, à l’aide d’un grutier, ont placé la pièce de trois tonnes sur une remorque pour la transférer à l’arrière du parc. Une opération délicate pour éviter tout risque de chute sur le trajet.
Superbe nouvelle, merci pour l’info !
Bravo pour ce document qui répond très bien aux questions qu’on se pose en découvrant les fabuleuses éoliennes Bollée… Je rédige actuellement un article pour une revue locale concernant une éolienne Bollée, et je citerai les référence de votre site. Merci de me dire si il y a des indications particulières à donner, concernant les droits de publication (sachant je n’utilise pas vos documents, mais je m’en inspire pour expliquer le fonctionnement…).
Merci pour cette belle présentation !
Philippe
Merci pour votre message. Vous pouvez utiliser sans problème les documents si vous citez la provenance. Je m’efforce d’être le plus pédagogique possible. Envoyez moi les références de votre article quand il sera rédigé. Cordialement
Si quelqu’un veut vendre une éolienne à restaurer qu’il me fasse signe…
Ou simplement des plans de fabrication…
Merci