Dans cet article, on va évoquer l’invention du chemin de fer et s’attarder sur les berlines qui convoyaient le minerai jusqu’au jour.
Ce n’est pas tout d’extraire le minerai, encore faut-il l’amener au jour.
La littérature consacrée aux conditions de travail des mineurs, sublimée par Germinal, met souvent l’accent avec un certain pathos sur la pénibilité et la dangerosité des taches effectuées au point que ces conditions peuvent nous paraître exagérées, pourtant, ces descriptions sont souvent bien réelles.
Avant la mécanisation, tout se faisait à la force des bras, voir des pieds qui servaient à repousser le minerai hors des zones d’abattage quand la dimension de celles-ci exigeaient de travailler à plat ventre. (Abattage à col tordu).
Quand l’espace le permettait, les brouettes étaient employées, mais c’est l’usage du panier qui prédominait. Parfois, ces paniers étaient posés sur des sortes de traîneaux munis de patins (Esclitte) qui « glissaient » sur des rondins.
Début XVIIIe, la dimension des galeries augmentent et les roues font leurs apparitions. Elles équipent des chariots de bois (chien de mine). Des chemins de planches (limandes) facilitent le roulage.
Ce croquis illustre une berline roulant sur des planches et possédant un système de guidage entre les roues avant. Parfois un simple bâton vertical remplissait cette fonction (clou de conduite).
Grâce aux développements de la métallurgie, les wagonnets en bois sont petit à petit remplacés par des berlines en tôle. Les rails métalliques remplacent les voies de roulage en bois. Primitivement, les rails avaient un profil en gouttière mais l’encrassement rapide de ceux-ci aboutit au profil que l’on connait maintenant. On peut noter que le chemin de fer a précédé l’usage de la locomotive d’une trentaine d’années.
Le rebord anti-déraillement du rail est transféré sur la roue. Voici une berline de 1837 munie de roues à gorges.
Musée de Molay Littry
Finalement, après plusieurs tâtonnements, les profils du rail et des roues deviennent ceux que l’on connait maintenant.
Extrait pris sur ce site.
Concernant la locomotion, c’est toujours bien souvent le principe « Titanic » : les femmes et les enfants d’abord ». (Herchage.)
Avec les besoins de l’industrialisation il faut augmenter les cadences. La maîtrise de la vapeur ainsi que l’électricité apportent des possibilités considérables et le secteur minier donne naissance à de nombreuses évolutions technologiques. Par exemple, il est à l’origine de la traction à vapeur avec Richard Trevithick qui met au point la première locomotive en 1804 pour tirer les berlines à Coalbrookdale en 1802, mais c’est une autre histoire.
Fin XIXe,l’emploi des berlines en tôle se généralise, la section des galeries augmente et nous entrons dans l’ère moderne avec les tractions d’abord animales puis par câbles ou chaînes et locotracteurs. (vapeur, diesel, électrique).
La pelle « EIMCO », actionnée à l’aide d’air comprimé, bascule le contenu du godet vers l’arrière où est attelée une berline.
D’autres méthodes de transport du minerai font leurs apparitions.
Des couloirs oscillants ou à secousses dont les effets conjugués de la force d’inertie et de la gravité font avancer le minerai.
Tapis roulants:
Des couloirs dits blindés dans lesquels une chaîne sans fin, munie de raclettes, entraîne le minerai.
Et pour finir, camions-navette:
Attardons nous sur les berlines et les façons de les vider.Les nombreuses marques de fabricants donnent une idée de l’importance du marché.
Le but est de supplanter au maximum le travail humain par une automatisation pour des raisons de pénibilité, mais surtout pour améliorer la productivité.
La chronologie n’est pas linéaire suivant les mines, les méthodes anciennes et nouvelles peuvent cohabiter pour des raisons de rentabilité ou en fonction de la configuration de l’exploitation. Dans les années 1970, en France, hercheurs et mulets officiaient encore dans les petites exploitations.
Les culbuteurs:
La berline est bloquée dans un châssis situé au-dessus de la trémie. Le châssis effectue une rotation complète qui vide le minerai dans la trémie.
La benne peut être basculée sur son châssis d’un coté ou de l’autre. Ce type de berlines associé à des voies de roulement amovibles a été développée entre autres par les Ets Decauville et Pétolat. Ils ont rencontré un vif succès également dans le monde agricole et militaire. Par contre, en terrain minier, elles présentent le désavantage de nécessiter le percement de galeries relativement larges. Notez l’espace entre les deux voies de roulage.
Elle permet des galeries de roulage plus étroites ce qui représente une économie quand ces voies de communication sont tracées dans des terrains stériles.(Travers banc)
Pour les mêmes raisons, on peut trouver des voies de roulage à 3 rails.Merci Exxplore pour la photo.
Avec les progrès de la traction, les berlines ont une contenance de plus en plus importante rendant les interventions manuelles inadaptées. Nous allons nous attarder sur un type de berline dont les particularités ont éveillé ma curiosité.
Quelles peuvent être les fonctions de ce galet latéral ainsi que ces axes d’essieux proéminents dont cette imposante berline est affublée ?
La façade opposée est formée d’un vantail articulé pour libérer le contenu.
Plus loin, un curieux rail surélevé en forme d’accent circonflexe fait face à une descenderie de bennage. Le lien avec la berline semble évident, nous voici en présence d’un procédé de déchargement automatique que je vais essayer de détailler.
Il faut faire abstraction du tuyau enchaîné dont l’installation est manifestement postérieur au système que l’on va décrire.
Le personnage donne une idée de l’élévation du rail basculeur. (L’ami N. a le bas du fessier à environ 0.90 m. du sol).
1) Sur la benne basculante un galet pivotant (B) et sur les moyeux, un axe saillant servant à empêcher un éventuel retournement de la berline (D)
2) Parallèlement à la voie de roulage , une rampe élévatrice (A) précédée d’un bec amovible (C) ainsi qu’un guide anti-bascule (E).
Quand on veut que la benne bascule, le bec amovible est placé de façon à ce que le galet (B) monte sur celui-ci et emprunte le guide élévateur (A). Le galet, solidaire de la benne, en s’élevant provoque l’inclinaison de celle-ci jusqu’à l’ouverture du ventail latéral. Le galet est articulé pour rester sur le guide élévateur au cours de la montée de la benne.
En vrai cela donne ça:
Détail du bec amovible dans la boue d’époque ! On aperçoit également le début du guide anti bascule. Si on veut que la berline passe son chemin dans verser son contenu, il suffit d’escamoter le bec amovible afin que le galet (B) reste en position basse et passe ainsi sous le guide anti bascule. Comme quoi, un simple petit bout de ferraille astucieusement employé peut faire de grandes choses.
Fort logiquement, l’autre extrémité de la rampe de bascule est dépourvue de bec amovible.
Pour vous remercier de votre patiente, vous avez droit à un dessin animé:
Je vous ai même déniché sur un excellent blog une réclame.
Une autre variante des Ets Massard:
Ce système ingénieux peut être appliqué pour un déchargement frontal.
Ce type de vidage a été appliqué en plan incliné pour le crassier de Decazeville.
Ici, c’est la solution contraire qui est utilisée, la rampe élévatrice se trouve sur la benne basculante et le galet pivotant est parallèle à la voie de roulage
Bref, suivant les mines et les époques, les modèles ne manquent pascomme on peut s’en rendre compte ici.
Inde : enfants dans les mines de charbon par rikiai
Un grand merci à Patrick M. et à l’arcotophile cavernophile pour les explications.
Tes photos sont toujours intéressantes, et le travail des enfants en Inde… je n’ai pas de mot…